Sylvestre et la question des amours…
Sylvestre, nous en avions déjà fait allusion, n’était plus tout à fait un jeune homme…Il approchait d’ailleurs davantage de l’âge mûr, celui auquel chaque femme ne saurait résister une fois l’attitude gentleman maitrisée.
Il avait eu des aventures, des liaisons éclaires, des passades en sorte, mais aussi et surtout une histoire qui avait beaucoup compté pour lui.
Ce n’était pas une beauté stéréotypée, elle avait au contraire un charme bien à elle, envoutant si on savait la regarder attentivement. Si on savait lire en elle.
Sylvestre avait su lire en elle et découvert les subtilités de son être.
Elle était une fille maligne, douée de ses mains et de son esprit. De l’esprit d’ailleurs elle en avait beaucoup et c’était cela qui avait plu en premier à Sylvestre ; son humour.
Myrtille (non ce n’était pas un pseudonyme !) possédait surtout de grands yeux noirs, tout en amande et qui en disaient long sur sa personnalité bouillonnante.
Ils brillaient dès que Myrtille avait une idée nouvelle en tête, toujours plus saugrenue, toujours plus délirante.
Dans les discussions que l’on pouvait engager avec elle, il fallait toujours s’attendre à bondir d’un sujet à un autre ; elle passait effectivement toujours du coq à l’âne, bien évidemment sans vous en montrer le moindre signal !
Elle était pétillante, pleine de vitalité et on sentait dès les premiers mots, avec son accent un peu aigu, qu’elle aimait sincèrement la vie et qu’elle savait en apprécier chaque instant.
Sylvestre se cachait en quelque sorte derrière cette personnalité détonante. Il ne se lassait jamais (du moins jusqu’à un certain temps) de l’écouter, tout en l’admirant.
Il cédait, à chaque fois que Myrtille le suppliait de sortir à minuit pour aller lui chercher sa boite de céréales, dont elle avait subitement remarqué l’absence, pour son petit déjeuner du lendemain ou lorsqu’elle le tannait pour aller voir cette fameuse expo d’art contemporain que son nouveau courroux, Michel le yogi man lui avait ardemment recommandé ou encore lorsqu’elle voulait le faire poser devant ses amies, pour leur faire admirer ses nouvelles créations, coutures et bijoux !
Sylvestre ne disait mot ou même si la tentative de sortir une parole contradictoire lui avait effleuré l’esprit, elle s’envolait aussitôt, dès que la trépidante Myrtille ouvrait son clapé pour rabattre celui de son compagnon !
Il avait été ainsi porté et emporté par cet amour qui avait duré un peu moins de trois années.
Et puis, il s’en est senti épuisé.
Toute la famille adorait et admirait cette jeune fille incroyable ; « Quelle dynamisme, toujours pleine de ressources et d’idées inépuisables, ça nous change de notre Sylvestre plutôt morose et un brin mou ! », lui répétait sa mère à chaque fois qu’il daignait lui rendre visite en cette charmante compagnie.
Il s’est aperçu un jour, qu’il ne vivait plus pour lui. Qu’il se retrouvait sans cesse dans l’ombre de cette si ENVAHISSANTE Myrtille !
Même au boulot ; il avait eu le malheur, pour faire bien face à ces supérieurs et avant tout pour prouver son honnêteté face à ses collègues, parfois sceptiques, (« Si, si, je vous assure, c’est une fille fantastique en plus, si vous la rencontriez, vous l’adoreriez aussitôt, surtout toi Bénédicte, vous avez plein de choses en commun ! ») de leur faire rencontrer « sa » femme.
Effectivement, personne n’avait pu émettre une seule critique la concernant. Tous avaient été fortement emballés par cette fraîcheur, cette désinvolture !
Certains collègues, du genre à se valoriser, le torse gonflé à bloc, lorsqu’une belette se retrouvait face à eux, en étaient même verts !
Comment un de ces Sylvestres peut-il réussir à se taper une minette de cette catégorie ???!
Ne sachant résoudre ce mystère ils connurent soudainement une affection particulière envers Sylvestre.
« Sylvestre, mais vient donc manger avec nous, tu nous raconteras ton succulent week-end avec Myrtille », ou encore « dis-donc mon pote, c’est quoi ce petit lieu sympa ou Myrtille t’a emmené hier soir, tu nous fais voir dans la semaine qu’on se régale aussi un peu ?! »
Il avait résisté pendant deux longues années à ce désir si pressant de leur faire ravaler leurs mauvais préjugés à son compte, de leur montrer qu’il pouvait, lui aussi, se pavaner au bras d’une nana qui en jetait !
Il savait qu’il y aurait pu avoir dérapage, et puis par fierté, il ne voulait pas faire entrer sa vie privée dans ce monde bureautique, regorgeant de manières et de relations tout à fait factices et conventionnelles, moisies quoi !
Il se doutait que cela pourrait changer la donne. Cependant, elle aurait très bien pu la changer en bien, en positif, en … promotion pourquoi pas !! (Non il n’aurait tout-de-même jamais envisagé de « prêter » sa concubine à ce pervers de patron dans ce but ! …??)
Quoiqu’il en soit, cela n’avait rien arrangé pour lui, une fois les présentations faites. Les collègues, collant au possible, et Bénédicte…! Ah oui, pour ça il avait eu un bon instinct Sylvestre !
Bénédicte et Myrtille avaient tout-de suite accrochées et ne se quittaient plus depuis !
Une fois chez l’une, une autre fois chez LUI. Dans les magasins, parlant de fringues, de couture et je ne sais encore d’autres activités caricaturément féminines, dont elles raffolaient !
Sylvestre aurait très bien pu faire comme la plupart de ces congénères masculins et laisser vivre ces caqueteuses dans leur coin, si…SI !
Oui, s’il n‘était pas tombé amoureux, quelque temps avant sa rencontre avec le fruit rouge, de Bénédicte !
Alors qu’il entrait en poste, il avait été accueilli si chaleureusement par cette magnifique et douce collègue, qu’il en était resté pantois !
Le temps avait permis à Sylvestre d’engager une approche sereine. Car, ne fonctionnant qu’à travers les émotions des autres, il était avant toutes choses, passé par une phase d’observation et de tentative de compréhension de l’objet humain et féminin qu’était Bénédicte.
Il en tirait certaines conclusions, qui, pensait-il, lui permettraient de mener la drague plus aisément.
Et…il s’en était tiré avec un râteau plutôt qu’avec un plateau doré !
Bénédicte aimait en lui sa gentillesse, sa délicatesse, ses attentions, mais ce qu’elle attendait à contrario d’un homme, c’était cette force de caractère, cette protection qu’on attribue au genre masculin face à ces si faibles femmes ! Oui, même si elle ne se l’avouait pas, c’était bien de cela dont elle rêvait.
Ainsi, le mignon Sylvestre pouvait et était un fort bon ami, un confident honnête et généreux, mais loin d’elle l’idée d’en faire un amant !
S’étant accordés sur le fait de ne plus reparler de ce malentendu et de faire comme si aucun sentiment n’avait été dévoilé, Sylvestre et Bénédicte travaillaient depuis, côté à côté, quotidiennement, avec ce lourd secret. (Du moins, lourd, il l’était uniquement pour lui)
Imaginez-vous ainsi, dans la situation fâcheuse, dans laquelle se retrouvait Sylvestre ; il côtoyait chaque journée sa bienaimée regrettée dans ses bureaux et à son retour dans son doux chez lui, il la voyait encore !
Bien sûr, il aimait encore énormément Myrtille, il l’aimait sincèrement même. Mais Bénédicte était restée une déception douloureuse et il savait qu’à tout moment, si l’occasion se présentait, qu’il pourrait en retomber follement amoureux.
Ne sachant comment apaiser son courroux et comment faire abstraction de ce copinage irritant, il devint totalement obsédé par l’idée que Myrtille en faisait trop et qu’elle lui pourrissait l’existence.
Il en devint presque fou et dû s’exiler quelques jours chez un ami proche et compréhensif, (prétextant qu’ils devaient travailler ensemble sur un projet très sérieux) afin de ne pas jeter tout bonnement Myrtille dehors, sans lui avoir laissé le temps de rien.
Ce court séjour n’atténua ce sentiment d’étouffement, que deux ou trois jours à peine.
Il prit la décision d’en référer rapidement à la personne concernée et l’envoya trouver refuge chez son amie si chère.
Bénédicte, outrée, ne souhaita plus lui adresser la parole.
Les longues journées de labeur, furent alors pour Sylvestre un vrai calvaire et ce, jusqu’à qu’il réussisse à être muté, dans une ville bien plus animée, bien plus désopilante, bien plus capitale ;
Paris !
3 commentaires »
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j’ai parcouru quelqes unes des pages de ton blog, j’ai:e beaucoup
Salut Delph,
Je suis subjugué par ce que je lis, vite vite, écrit la suite, c’est super j’aime ta façon d’écrire, tu me tiens en haleine.
Toutes mes félicitations car je crois que ton premier essais peut se révéler être un chef d’oeuvre.
Sylvestre et la question des amours.. Awful